La première chose qui s’exprime chez les mères qui inculquent le sentiment de dette à leurs enfants est une sorte de déni autour du fait même d’être mère. Il semble que cette condition lui ait été imposée par leur propre enfant, non qu’il s’agit d’une décision prise ou assumée par elles.
Il est possible qu’il y ait de cela à l’origine de cet état : consciemment ou inconsciemment, la mère blâme l’enfant car elle considère que c’est lui qui l’a faite mère. Si l’enfant n’avait pas existé, elle n’aurait pas eu à consacrer ses meilleures années et ses plus grands efforts à prendre soin de lui et à l’élever. Il existe donc, selon elle, une dette légitime.
Fortes de cette conviction, ces mères ne perdront pas l’occasion de recueillir ce qu’elles pensent leur appartenir : la soumission et l’amour inconditionnel de leurs enfants. De manière générale, ouvertement ou clandestinement, elles réclament généralement une compensation pour leurs efforts essentiellement physiques : pour l’accouchement, l’allaitement, le changement de couches, l’alimentation, la prise en charge de l’enfant en cas de maladie, etc. Que se passe-t-il alors?
Mères malfaisantes ou mères ayant des problèmes psychologiques ? Ces mamans aiment en effet souvent leurs enfants autant qu’elles le peuvent en fonction de leurs lacunes psychologiques. Pour aimer avec un « A » majuscule, il faut une base de santé mentale adéquate. On ne peut, à défaut, n’offrir qu’un « amour » avec un « a » minuscule. Ce dernier est alors contaminé par les peurs, les vides, les désirs frustrés et les carences. Il s’agit malgré tout, au fond, d’amour. L’autre est blessé “involontairement”. Il est acculé en vertu des propres labyrinthes, limité par les limites propres .
Les mères qui inculquent le sentiment de dette à leurs enfants veulent souvent le meilleur pour eux. Le problème est qu’elles ne savent même pas ce qui est le mieux pour elles-mêmes. Elles ont encore moins travaillé pour y parvenir. Et elles trouvent dans la maternité une excuse pour ne pas prendre leurs responsabilités.
Se réconcilier avec la maternité : Être mère commence par engendrer et mettre au monde un être nouveau, pour ensuite veiller sur lui et le faire survivre à sa propre vulnérabilité. C’est en soi une tâche gigantesque, comme l’est tout acte transcendant qui est accompli dans la vie.
Mais la mère n’est pas là uniquement pour assurer le bien-être physique de son enfant. Outre ses soins et sa protection, elle offre également à son tout-petit un sens à son existence et sème à jamais les graines de sa constellation affective. Ce n’est pas une tâche qui devrait constituer un poids, mais un exploit dont être fier.
La culpabilité installée dans la conscience des enfants ne leur fait pas du bien. Il leur est plus difficile de se reconnaître et de concevoir un projet de vie cohérent. Ils douteront d’eux-mêmes et il leur sera difficile d’accéder à l’autonomie et à l’indépendance. Tout cela peut être évité lorsque les mères qui inculquent le sentiment de dette à leurs enfants se réconcilient avec leur maternité et renoncent à la manipulation.